THÉMATIQUE

La montagne productive

ARCHITECTURE

Une étable

LIEU

Borgata Roccia, Sampeyre
Val Varaita

Alpage. Sampeyre. Vallone Infernet (Pian Biairette+ 2100/+2664 Tete rouge o Punta della Rasciassa). Alessandro Guida

À PROPOS

Re-Abiter les territoires alpins impose la remise en question de leurs dimension productive. Les nouveaux montagnards qui reviennent habiter les Alpes apportent une idée de développment fondée sur une nouvelle façon de concevoir l’habitat des territoires alpins et ruraux: valorisation du patrimoine agricole, à partir de la redécouverte des ressources et savoir-faires locaux pour les réutiliser et les adapter au présent.

Sampeyre

Italia

Motocyclette du berger pour les déplacements en montagne. Sampeyre. Alpage Raie. +2100 m altitude.Alessandro Guida
Ruines. Sampeyre. Alpage Raie.+ 2100 m altitude. Alessandro Guida
Il torrente e il limite tra le aree del pascolo- Sampeyre- Vallone Infernet- Davide Curatola Soprana
Le torrent Milanesio et la limite entre le terrain de pâturage. Sampeyre. Alpage Raie. +2000 m altitude. Davide Curatola Soprana
Roccia Villaretto vue de Foresto. Sampeyre. Foresto. +1200 m altitude. Alessandro Guida
La chapelle et le paysage en pente. Sampeyre. Foresto.+1200 m altitude. Davide Curatola Soprana

THÉMATIQUE

La montagne productive

Second coupe de foin. Sampeyre. Roccia Villaretto. +1000 m altitude. Alessandro Guida
"C’est fatigant, mais je me sens plus libre et plus responsable".

Flavio

Éleveur
Nouvelle implantation de vignobles. Sampeyre. Borgata Roccia.+ 1100 m altitude. Isabella Sassi Farìas
Étable et équipments de travail. Sampeyre. Borgata Roccia. +1100m altitItude. Isabella Sassi Farìas
Vue rue l'étable. Sampeyre. Borgata Roccia. + 1100 m altitude. Isabella Sassi Farìas
L'interieur de l'étable. Sampeyre. Borgata Roccia. + 1100 m altitude. Isabella Sassi Farìas
Une scierie industrielle. Brossasco. + 600 m altitude. Alessandro Guida

Le récit

La construction de un étable dans le Hameau Roccia de Sampeyre (18 habitants sur une commune de 1 024 habitants), in Val Varaita. Un jeune couple choisit ce site pour construire un nouvel espace pour son activité agricole. L'étable se situe au sein du système productif et construit le paysage.
L'étable devient l'occasion pour explorer la dimension productive dans les territoires des Alpes : de la prise en charge quotidienne du territoire au nettoyage des forêts de frênes, des chemins et pistes muletières autour des hameaux, jusqu’au tissage des bordures des pâturages pendant la saison de transhumance et l’utilisation du bois, coupé et travaillé dans les menuiseries de la vallée comme matériau de construction.

De nouvelles communautés planifient de nouveaux modèles de vie alpine

ARCHITECTURE

Lou Pourtoun

LIEU

Ostana
Valle Po

THÉMATIQUE

La montagne productive

ARCHITECTURE

Une étable

LIEU

Borgata Roccia, Sampeyre, Val Varaita
Alpage. Sampeyre. Vallone Infernet (Pian Biairette+ 2100/+2664 Tete rouge o Punta della Rasciassa). Alessandro Guida

À PROPOS

Re-Abiter les territoires alpins impose la remise en question de leurs dimension productive. Les nouveaux montagnards qui reviennent habiter les Alpes apportent une idée de développment fondée sur une nouvelle façon de concevoir l’habitat des territoires alpins et ruraux: valorisation du patrimoine agricole, à partir de la redécouverte des ressources et savoir-faires locaux pour les réutiliser et les adapter au présent.
Motocyclette du berger pour les déplacements en montagne. Sampeyre. Alpage Raie. +2100 m altitude.Alessandro Guida
Ruines. Sampeyre. Alpage Raie.+ 2100 m altitude. Alessandro Guida
Le torrent Milanesio et la limite entre le terrain de pâturage. Sampeyre. Alpage Raie. +2000 m altitude. Davide Curatola Soprana
Roccia Villaretto vue de Foresto. Sampeyre. Foresto. +1200 m altitude. Alessandro Guida
La chapelle et le paysage en pente. Sampeyre. Foresto.+1200 m altitude. Davide Curatola Soprana

THÉMATIQUE

La montagne productive

Second coupe de foin. Sampeyre. Roccia Villaretto. +1000 m altitude. Alessandro Guida
"C’est fatigant, mais je me sens plus libre et plus responsable".

Flavio

Éleveur
Nouvelle implantation de vignobles. Sampeyre. Borgata Roccia.+ 1100 m altitude. Isabella Sassi Farìas
Étable et équipments de travail. Sampeyre. Borgata Roccia. +1100m altitItude. Isabella Sassi Farìas
Vue rue l'étable. Sampeyre. Borgata Roccia. + 1100 m altitude. Isabella Sassi Farìas
L'interieur de l'étable. Sampeyre. Borgata Roccia. + 1100 m altitude. Isabella Sassi Farìas
Une scierie industrielle. Brossasco. + 600 m altitude. Alessandro Guida

Le récit

La construction de un étable dans le Hameau Roccia de Sampeyre (18 habitants sur une commune de 1 024 habitants), in Val Varaita. Un jeune couple choisit ce site pour construire un nouvel espace pour son activité agricole. L'étable se situe au sein du système productif et construit le paysage.
L'étable devient l'occasion pour explorer la dimension productive dans les territoires des Alpes : de la prise en charge quotidienne du territoire au nettoyage des forêts de frênes, des chemins et pistes muletières autour des hameaux, jusqu’au tissage des bordures des pâturages pendant la saison de transhumance et l’utilisation du bois, coupé et travaillé dans les menuiseries de la vallée comme matériau de construction.

De nouvelles communautés planifient de nouveaux modèles de vie alpine

ARCHITECTURE

Lou Pourtoun

LIEU

Ostana, Valle Po

Une étable

La montagne productive

1

Antonio De Rossi et Laura Mascino, « Valades ousitanes, architettura e rigenerazione », ArchAlp 4/2020

L’un des sujets clés de cette recherche a été sans aucun doute l’exploration de la dimension productive dans les territoires des Alpes : la régénération des terres agricoles, la protection du territoire, l’innovation des modèles économiques et les approches qui partent de la mise en valeur des ressources locales. Au Val Varaita, à Sampeyre, le cœur de l’enquête photographique est la réalisation d’une étable par le studio Amùn, ou Amoun, qui en occitan signifie « en amont, là-haut ». Pour cette raison, Barbara décide de nous emmener en haut, à cet endroit connu par les habitants comme la vallée d’Infernet (2 400 m) juste en dessous de la Punta Rasciassa (2 664 m), sur la ligne de partage des eaux entre Val Varaita et Valle Po. 

Là-haut, au milieu des nuages, se trouvent les vaches que son copain Flavio a amenées jusqu’ici, dernière étape de l’ascension vers l’herbe plus fraîche. Pendant la période de transhumance, d’avril à fin novembre, Flavio déplace ses animaux en accomplissant une ascension patiente qui part du village de Roccia, à 1 100 m, continue à Foresto (1 200m), puis à Chioffredo à 1 300 m, à Champanes à 1 500 m, pour rejoindre les pâturages le plus hauts en août. Les signes au sol nous racontent son itinéraire. Flavio trace quotidiennement, un pieu après l’autre, les limites du pâturage. Chaque jour, il laisse sa moto juste au-delà de la Madonna della Neve et il parcourt à pied les sentiers, localement appelés viol, du plateau jusqu’au vallon de l’Infernet « autrefois un lieu de mines de cuivre, de fer, d’amiante et de géodite », nous raconte Barbara pendant que nous montons. Plus loin, là où le sol devient raide et atteint la crête, se trouvent leurs 50 vaches de race piémontaise. La viande est vendue à une coopérative agricole d’Alessandria pour la transformation et la vente. 

« C’est un travail épuisant » nous dit Flavio qui n’est pas originaire de Roccia, mais qui a choisi de venir vivre ici avec sa famille et de miser sur les ressources agricoles de ce territoire. Il y a la liberté de choix mais aussi la responsabilité et l’autodétermination qu’il partage avec Carlo, le montagnard que nous avons rencontré à Prinardo. Il y a surtout la fatigue quotidienne que partagent tous ceux qui vivent dans les hautes terres. 

Juste le temps de déplacer les filets et de redessiner l’espace du pâturage, Flavio retourne à Roccia, à l’étable, où il est en train de couper le foin. Il parcourt le chemin à rebours, traversant les bourgades de Calchesio et de Foresto où travaillent quelques fromagers, agriculteurs et éleveurs, les derniers véritables gardiens du paysage. 

Le versant sur lequel se trouve Flavio, situé sur la gauche orographique, est l’adret ou  adrecc, où les pâturages sont plus étendus et la pente est plus douce ; sur ce versant on laissait croître les frênes dont le bois était utilisé pour la construction et le chauffage. Le versant nord, ou ubac, se caractérise par des pentes abruptes et des forêts de mélèzes. 

Flavio et Barbara ne possèdent pas de grand terrain à pâturage. Ils ont acheté avec peine de petites parcelles de terres abandonnées, ils les ont débarrassés de la broussaille près de l’étable et ils produisent du foin. Le rêve de Flavio est celui de récupérer d’autres terrains agricoles et de planter une vigne. Ils vivent à Roccia, à quelques pas de l’étable. 18 habitants toute l’année. Ce sont des montagnards de retour, très scolarisés, des chercheurs, des professionnels, qui avec de nouveaux projets entrepreneuriaux décident de s’installer dans les Alpes. Barbara est née là-bas ; après ses études et son travail ailleurs, elle a décidé de retourner à Roccia avec sa famille. 

Elle est architecte, enseignante en France, elle est mère, elle dirige une association culturelle et aide son copain dans les activités agricoles.

L’étable revêtue de bois de mélèze est née comme un artefact à usage productif, où l’organisation de l’espace suit la logique du travail agricole dans une relation de transformation mutuelle entre l’intérieur et l’extérieur selon les besoins de production et la saisonnalité. L’étable se situe dans le système de production local et façonne le paysage : de l’entretien quotidien du territoire au nettoyage des forêts de frênes tout autour, des sentiers et des chemins muletiers qui traversent les hameaux jusqu’au tissage des bordures des pâturages pendant la saison de transhumance et à l’utilisation du bois comme matériau de construction. 

Les nouveaux pionniers alpins recherchent eux aussi un modèle, le juste équilibre entre durabilité économique et valorisation territoriale, à partir de la redécouverte des ressources endogènes ; ici en Val Varaita comme dans le hameau Valliera, dans la Valle Grana. Paolo Ornato est architecte, Claudio Conterno et Elisa Fantino sont viticulteurs de la Bassa Langa, Oscar Benessia et sa famille cultivent l’ail à Caraglio et le conservent à 1 500 m d’altitude. Ce territoire mise sur le projet de relance de la production de Castelmagno d’alpage en l’associant à la récupération du système habité et en associant l’exploitation agricole à la valorisation de la montagne comme destination touristique douce, lieu d’histoire et de culture alpine. 

La fabrication du Castelmagno est soumise à un cahier des charges très strict. Du fait de la composition des sols, ce fromage est produit uniquement dans la Valle Grana, dans les territoires de Monterosso Grana, Pradleves et Castelmagno. Pour cette raison, la logistique de production, qui comprend des alpages à 2 000m d’altitude, s’est avérée très compliquée dès le début. Pour permettre au projet de démarrer il fallait transporter vers le haut les véhicules avec des grues et des engins de chantier, la priorité étant celle de résoudre le problème de l’accessibilité au site. Le consortium de propriétaires (aujourd’hui 25 personnes) est responsable de l’entretien de la route qui rejoint la Valliera, mais surtout il s’est occupé de la construction d’une nouvelle route qui monte vers les alpages et brise la pente des pâturages.

Aujourd’hui, le hameau n’est habité qu’en été, ce qui veut dire seulement trois mois par an, s’il neige beaucoup. Rendre accessible ce hameau fait l’objet de discussions : « il est difficile de faire vivre la montagne et de créer une continuité dans les stratégies territoriales s’il n’y a pas de liaison avec et entre les villages ». Cela reste une question de fond si l’on veut surmonter l’isolement et la ségrégation sociale et économique de nombreuses zones de montagne et rurales. 

Carlo est originaire de Mondovì, mais depuis sa naissance il passe la période de la transhumance à Prinardo, dans la commune d’Argentera, Alta Valle Stura. Comme ses parents, il est un éleveur de vaches à viande. Il fait partie de ceux qui ont un lien historique et familial avec le territoire et qui ont décidé de continuer la tradition. Il nous dit qu’aujourd’hui il y a cinq éleveurs, qui viennent tous d’ailleurs. 

Il s’agit d’environ 1 350 animaux qui paissent sur le territoire d’Argentera pendant l’été. Tous les éleveurs sont jeunes, âgés de 20 à 30 ans. 

Carlo s’occupe du bétail depuis qu’il a terminé l’école d’agriculture. Ils ont tous la détermination de ceux qui ont fait un choix. « C’est un travail dur. Les animaux paissent toujours à l’extérieur tout au long de l’été. Le troupeau se disperse et ici la montagne est très inconfortable. Nous devons mener à pied les animaux. Maintenant, ils se trouvent au-dessus de 2 500 m. Il me faut une heure et demie chaque jour pour les atteindre. Si je vais en moto, je fais plus vite. C’est fatigant, mais je me sens plus libre et plus responsable. Eux aussi, comme Flavio à Roccia, sont les gardiens du territoire. «S’il n’y avait pas les éleveurs qui nettoient les prairies et gardent les pâturages propres, il y aurait un risque d’incendie » nous dit Germano qui vit à Serre, un petit hameau d’Argentera. 

Des personnes qui explorent et qui renouvellent les ressources et les connaissances du territoire pour les réutiliser et les adapter au présent. Silvia Rovere, la nouvelle maire d’Ostana, est convaincue qu’une économie durable auto-suffisante peut se développer à la montagne, et elle l’a démontré. Elle s’occupe de la création d’un réseau de producteurs du territoire pour développer une économie locale à filière courte, en particulier elle explore la possibilité d’une collaboration entre vallées avec la brasserie Kauss de Piasco, au Val Varaita. Sur son territoire le jardin potager d’Ostana, de Serena Giraudo, expérimente la production de certaines céréales, dont le seigle, qui semble répondre le mieux. 

Pour cette raison, la maire propose à Kauss un projet de fabrication de bière alpine à base de seigle cultivé à Ostana, qui aboutit à la naissance de 3841, une bière vendue seulement dans les refuges alpins au-dessus de 1 000 m.

«Ce sont les nouveaux montagnards qui reviennent habiter les Alpes ». Jeunes et moins jeunes, « ils apportent une idée de développement de la montagne qui repose non seulement sur le tourisme, mais aussi sur une nouvelle habitabilité du territoire, où les thèmes de la régénération sociale à base culturelle, de la nouvelle agriculture, de la réactivation des patrimoines, de la construction de nouvelles formes d’économie et d’aide sociale jouent un rôle décisif », remarquait Antonio De Rossi dans un article publié cet été dans Arch Alp¹.